Rachida Alaoui signe aux éditions Skira l'ouvrage "Florilège de la broderie marocaine" consacré aux broderies citadines
"Découvrir ces broderies, c’est franchir le seuil de l’habitat, c’est pénétrer dans l’intimité d’une famille, partager son art de vivre et ses coutumes" explique-t-elle. C’est aussi une invitation à voyager dans le temps et l’espace, car la broderie, qui n’a pas cessé d’évoluer, a suivi toutes les mutations du Maroc.

L’exploration de cet art au permet de saisir comment des inspirations venues d’ailleurs, d’Orient ou d’Occident, ont donné naissance, dans chaque grande ville marocaine, à des broderies originales qui ont embelli le mobilier textile et les pièces vestimentaires. Que ce soit Rabat, Salé, Fès, Meknès, Azemmour, Tétouan, Chaouen, la diversité du répertoire et des techniques repose sur la transmission du savoir-faire par les aînées,  l’habileté, la faculté de concentration et d’imagination de la jeune brodeuse qui réalisait la décoration de son trousseau.

Résultat: des parures polychromes ou monochromes, exécutées en soie ou au fil métallique sur toutes sortes de supports (étamines de lin ou de coton, taffetas, satins, épais velours). Quant aux points broderie, ils diffèrent d’une ville à l’autre. Ils produisent sur le fond de l’étoffe des décors luxuriants et raffinés, composés soit de motifs géométriques, soit de motifs végétaux stylisés. La plupart de ces broderies ont été en usage jusqu’à la moitié du XXe siècle.

Répandue à part égale dans le vêtement et le mobilier, la broderie marocaine n’a pas manqué d’attirer la curiosité des artistes voyageurs, des ethnologues, des historiens de l’art. Dans le même temps, les costumes et les parures du Maghreb ont inspiré de grands couturiers européens, comme Paul Poiret, Mariano Fortuny, Jeanne Lanvin. Périodiquement, les broderies de Fès, de Rabat, de Tétouan investissent la mode occidentale et font revivre par petites touches les charmes oubliés de l’orientalisme.

Mais cette interrogation du patrimoine textile de l’Afrique du Nord portée tout au long du XXe siècle par les stylistes étrangers, et qui culmine avec le travail d’Yves Saint Laurent dans les années 80, a peu de chose à voir avec ce qu’elle suscite actuellement au Maroc en termes de création.

Laissées un temps en sommeil, les broderies marocaines ont fait une réapparition dans les caftans contemporains de luxe. Grâce à des stylistes éprises de traditions, on assiste à un renouveau de cet art. Parmi ces figures tutélaires, se distinguent  Zhor Sebti, Tamy Tazi, Zbida Alami... Dans leur sillage, des ateliers ont été créés, des savoir-faire ont repris vie, des vocations se sont déclarées. La haute couture lui a ouvert de nouvelles perspectives.